mercredi 5 décembre 2012

50 millions pour quoi faire ?

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Emprunts toxiques : 50 millions pour quoi faire ?                  
 
Le gouvernement est à l'origine d'un amendement au 3e projet de loi de finances rectificative (PLFR) pour 2012 qui créé un fonds de soutien de 50 millions d'euros à destination des collectivités locales ayant souscrit des emprunts structurés risqués. La Fédération des villes moyennes (FVM) appelle de son côté, le 4 décembre, les collectivités a assigner les banques.

Depuis le discours du ministère de l’Economie Pierre Moscovici le 8 novembre à Dijon, le gouvernement affiche sa volonté d’agir pour aider les collectivités locales empêtrées dans leurs emprunts dits “toxiques”. Le PLFR présenté le 14 novembre 2012 en Conseil des ministres prévoyait le déblocage d’une somme de 25 millions d’euros en direction des acteurs locaux en difficulté.
Finalement, un fonds de soutien de 50 millions d’euros pourrait voir le jour. Il aurait pour “vocation d’apporter une aide financière aux collectivités particulièrement fragiles qui n’auraient la possibilité de financer seules le coût de sortie ou de réduction du risque de leurs emprunts structurés les plus sensibles”.

C’est en tous cas ce que prévoit l’amendement voté à l’Assemblée le 3 décembre 2012 dans le cadre du 3e PLFR pour 2012.
L’État apporterait 25 millions d’euros sous forme de crédits budgétaires ouverts sur le programme « concours spécifique et administration » de la mission « Relations avec les collectivités territoriales » ; les collectivités locales participeraient avec l’octroi de 25 millions d’euros prélevés sur le produit des amendes de police qui leur est destiné. “La fraction du produit des amendes de police de circulation initialement affectée aux collectivités territoriales et réaffectée au budget général en 2012 [devra être] majorée à due concurrence”, est-il précisé.

“Cet amendement constitue une surprise, ce qui démontre la précipitation [avec laquelle il a été déposé] et l’absence de concertation”, déplore le 4 décembre 2012 Jean-Pierre Gorge, député UMP et rapporteur de la mission d’information sur les emprunts toxiques menée l’an passé à l’Assemblée.
Pour ce dernier, le montant de 50 millions “ne correspond pas à la réalité” – le coût global de sortie de ces emprunts étant estimé à 10 milliards d’euros – et démontre 2 choses : la “reconnaissance d’une erreur des collectivités” et que “l’Etat se porte garant pour elles”.

Fonds mutualisé - Acteurs publics contre les emprunts toxiques avait réclamé le 21 novembre 2012 la mise en place d’un fonds de soutien mutualisé dont le montant n’avait pas été précisé, mais devait s’élever à plusieurs centaines de millions d’euros. La solution du gouvernement est loin du compte.
De plus, l’association suggérait un abondement par une contribution du système financier qui n’a pas été retenue par l’amendement.

Le président d’Acteurs publics contre les emprunts toxiques, le sénateur-maire de Saint-Etienne, Maurice Vincent (PS), était reçu le 4 décembre à Bercy pour évoquer ces propositions. Le ministère des Finances ne semblent pas prêt à aller beaucoup plus loin, estimant que ses services accélèrent déjà par rapport au précédent gouvernement.
“Il faut une discussion approfondie avec les élus pour trouver une solution pérenne et plus juste” que ce fonds de 50 millions, considère Maurice Vincent, qui attends de voir les modalités de fonctionnement de celui-ci pour éventuellement déposer des amendements lors de l’examen du PLFR au Sénat.

Les villes moyennes pour les recours - Hasard du calendrier, la FVM avait choisi le 4 décembre pour dévoiler les résultats d’une enquête auprès de ses adhérents sur les emprunts toxiques. 31 % d’entre eux affirment avoir des difficultés réelles avec la présence de produits structurés jugés “nocifs”. Un tiers déclarent posséder des produits structurés classiques et le tiers restant ne pas être concerné.
Une dizaine d’adhérents de la FVM aurait introduit des recours en justice, dont Angoulême, Aubagne, Saint-Dié-des-Vosges, Saumur ou Vienne.

Si le président de l’association, Christian Pierret, conseille toujours la négociation, il appelle cette fois-ci les collectivités à s’engager au contentieux à titre conservatoire. “Assigner les banques, ce n’est pas leur déclarer la guerre, estime-t-il. Nous souhaitons négocier mais pas en position de faiblesse, il ne faut donc pas laisser passer les délais de prescription” de 5 ans.
“Les conditions de négociations s’avèrent très défavorables, ajoute-t-il, avec parfois des soultes très importantes, égales ou supérieures au montant restant dû et des taux plus importants que ceux pratiqués pendant la période à taux fixe.”

Structure de défaisance - La FVM demande également la mise en place d’une structure de défaisance à laquelle serait affectée une partie des fonds d’épargne de la Caisse des dépôts “pour que les collectivités aient de nouveau la capacité d’investir”.
L’association demande par ailleurs l’interdiction de l’accès à ces produits dits “toxiques” et la soumission des contrats d’emprunts au code des marchés publics.
“Il faut avoir une attitude collective déterminée et responsable”, juge Christian Pierret.

Jean-Pierre Gorges de son côté a remis en circulation la proposition de loi élaborée à la suite de la mission d’information et qui prévoit la création d’une structure de cantonnement pour ces crédits problématiques.
“Obligeons l’Etat à mettre les banques et les collectivités autour d’une table pour repackager ces emprunts en gérant la toxicité à part”, remarque-t-il.

Quelle que soit la solution, fonds de soutien mutualisé, structure de défaisances ou de cantonnement, les élus convergent vers une solution nationale à la hauteur des enjeux. Ce que n’a pas proposé jusqu’ici le gouvernement.

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