Emprunts toxiques : la parole est à la défense
Audition sous tension, mercredi 2 novembre, avec la venue des banques devant la «commission d’enquête sur les produits financiers à risque souscrits par les acteurs publics locaux » à l’Assemblée Nationale.Le président, Claude Bartolone (député PS de Seine-Saint-Denis et président du conseil général) et le rapporteur, Jean-Pierre Gorges (député UMP de l’Eure-et-Loir) ainsi que tous les membres présents attendaient un certain nombre de réponses de la part des établissements bancaires après avoir entendu les acteurs publics victimes de prêts toxiques.
Ils n’ont cependant pas fait preuve d’une grande exigence, se contentant le plus souvent de réponses convenues, sans pousser plus loin l’investigation.
Les représentants des banques se sont rassemblés derrière l’argument avancé par Francis Canterini, directeur général délégué du Crédit Agricole Corporate : « L’argent facile n’existe pas ». Traduction : quand on veut des taux bonifiés, il y a un risque à prendre et les collectivités auraient dû le savoir.
Les banques ont répondu à une demande - Pourquoi avoir proposé des emprunts structurés aux collectivités locales ? Les banques ont affirmé, unanimes : nous avons répondu à une demande.
Pierre Mariani, président du Comité de direction de Dexia, est revenu sur le contexte propre à la période comprise entre 2005 et 2008 : « Certaines collectivités désiraient sortir d’emprunts à taux fixes dont le montant était jugé trop élevé par rapport au marché ».
Elles ont donc adopté la solution proposée par les banques : les emprunts structurés. Ensuite, ce fut la fuite en avant : « Certaines collectivités ont désiré continuer à alléger les charges de leur dette, parfois à la veille d’échéances électorales, et il a donc fallu prendre des positions plus agressives », a-t-il ajouté.
Olivier Klein, directeur général Banque commerciale et Assurances de la BPCE (Banque Populaire Caisse d’Epargne), avance même que certains produits ont été fabriqués pour répondre aux caractéristiques demandées par les collectivités.
Certaines collectivités ont su refuser - Concernant la capacité des collectivités à comprendre les risques des emprunts structurés, la BPCE, par exemple, assure avoir été particulièrement vigilante au degré de compétence de ses interlocuteurs.
De plus, lorsque le risque s’est avéré, les établissements bancaires affirment avoir pris les devants : «Dès 2006, nous avons averti nos clients du danger que représentaient ces produits. Certains ont accepté nos propositions pour en sortir, d’autres les ont refusées », explique Francis Canterini. Aujourd’hui, les établissements soutiennent ne plus commercialiser de tels produits : « Alors que nous avons proposé jusqu’à 223 types de prêts en 2008, nous n’en proposons plus qu’une quinzaine aujourd’hui » souligne Pierre Mariani.
Alors, quel est le rôle des banques ? - Lors des auditions précédentes, le rôle de Dexia comme conseiller financier avait été évoqué, notamment dans le cas des petites communes. Pierre Mariani a cependant été catégorique : « Nous n’avons jamais joué le rôle de conseiller ».
De toutes les façons, a tranché Olivier Klein: « On ne prend pas un produit qu’on ne comprend pas. J’ai toujours dit cela à mes équipes financières». Cet avertissement aurait sûrement été utile à Xavier Martin-Le Chevalier, le maire de Trégastel (Côtes d’Armor), petite commune de 2300 habitants, venu témoigner lors d’une précédente audition : il a contracté un prêt structuré appelé « Tofix Dual », qui, malgré son nom, était indexé sur un taux variable. Montant de la facture pour sa commune: 750 000 euros d’intérêts supplémentaires dans le pire des scénarios. Cette somme correspond à une augmentation de 45% de ses impôts locaux.
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