vendredi 28 novembre 2014

La moitié des villes insolvables ?

http://www.lejdd.fr/JDD-Paris/La-moitie-des-villes-insolvables-702090

La moitié des villes insolvables ?

Le sénateur-maire Philippe Dallier, coauteur d’un rapport sur les finances locales, tire le signal d’alarme après le rapport d'information sur les finances locales à l'horizon 2017, coécrit par Philippe Dallier, est inquiétant*. Le sénateur-maire (UMP) des Pavillons-sous-Bois (Seine-Saint-Denis) s'interroge : va-t-on vers une faillite de certaines collectivités locales? L'effort financier que l'État leur demande est, selon lui, "impossible à réaliser". Cet effort pourrait même, en 2017, conduire maintes villes, devenues "insolvables", dans une "impasse budgétaire". Il est vrai que le plan de réduction de la dépense publique pour les collectivités locales atteint 11 milliards d'euros, venant s'ajouter au 1,5 milliard de baisse de la dotation générale de fonctionnement (DGF) appliquée en 2014. L'effort exigé est donc sans précédent : les trois exercices 2015, 2016, 2017 vont ramener les dotations de l'État à ce qu'elles étaient en… 2002.

Une hausse des impôts locaux

Depuis le début des années 2010, les dépenses de fonctionnement des collectivités croissent de 3% par an, les recettes entre 1,5% et 2%. À ce rythme, entre le tiers et la moitié des villes de 10.000 à 50.000 habitants, en Île-de-France et ailleurs, pourraient connaître, selon le rapport, des difficultés financières. "On est en pleine crise", résume Philippe Dallier. Selon le rapport, les collectivités les plus fragiles (villes de plus de 10.000 habitants et départements), parfois affectées par des emprunts toxiques, seraient dans le rouge pour la moitié voire les deux tiers d'entre elles. Les "impasses financières" seraient la règle : on ne pourrait plus, par exemple, entretenir le patrimoine communal, les impôts locaux pourraient exploser.
Aux Pavillons-sous-Bois, la ponction nationale de 11 milliards d'euros se traduirait par une baisse de 1,6 million d'euros de la DGF en trois exercices budgétaires. "1,6 million d'euros, c'est 10% du produit annuel des impôts locaux", fait valoir Philippe Dallier, lui qui a fait baisser la dette de sa ville (11 millions d'euros, la moitié de la moyenne nationale) et produit 3,7 millions d'euros d'épargne brute permettant de rembourser la dette. "Dix-neuf ans d'efforts financiers vont être ruinés par l'État. En quatre ans, je vais être sous la ligne de flottaison. Même les villes peu endettées vont connaître des moments difficiles."
Comment redresser la situation? Selon le rapport, ramener le niveau de dépenses au niveau de l'inflation (1%) ne suffira pas. Il faudra y ajouter une diminution de 30% de l'investissement – sans parler d'une hausse des impôts pour atteindre l'équilibre en 2017. "Où faire des économies dans ma ville?" demande Philippe Dallier. Pas dans les dépenses de fonctionnement. En 2013, elles sont plus faibles aux Pavillons-sous-Bois (1.312 euros par habitant) que dans les villes comparables (1.590 euros). Vendre des biens communaux? "Je n'ai pas d'éléphant blanc, pas de piscine, pas de patinoire." Réduire le personnel qui dispose d'un statut et absorbe 60 % du budget de fonctionnement? "Je n'ai recruté personne. Quatre à cinq agents partent à la retraite chaque année." Faire des choix? "Quoi supprimer : une crèche de 80 berceaux (200.000 euros/an), le théâtre-cinéma (265.000 euros/an), le centre municipal de santé (300.000 euros/an), alors que la Seine-Saint-Denis est un désert médical?" Reste la baisse de l'investissement. "Il faudra sans doute aller jusqu'à 40% de baisse de l'investissement." Or, les collectivités réalisent 75% de l'investissement local. Il faut donc s'attendre, selon Dallier, à des "milliers" de suppressions d'emplois dans le BTP. Sombre perspective. Reste, enfin, la hausse des impôts locaux. "Je vais pouvoir tenir 2015 sans hausse d'impôt. Mais en 2016, j'aurai la tête sous l'eau. Je ne peux pas dire actuellement quel sera le niveau de cette hausse."
Le sénateur estime que cette réduction drastique des crédits aux collectivités (visant à atteindre les 3% de déficit national) est "impossible" à appliquer telle quelle. "Il aurait fallu étendre l'effort sur six ans. C'est-à-dire un mandat de maire. Si rien n'est négocié avec l'État, conclut Dallier, mes collègues endettés sont morts financièrement." Et les contribuables aussi…
* Rapport d'information n° 95, avec les sénateurs Charles Guené et Jacques Mézard, 126 p. la baisse des aides de l’État.
dimanche 23 novembre 2014


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