dimanche 18 octobre 2015

Commission des finances : Emprunts toxiques Amendement I-CF1

Commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire

Mercredi 7 octobre 2015

Séance de 21 heures

Compte rendu n° 4

Présidence de M. Gilles Carrez, Président

Extrait : Amendement I-CF1.M. Marc Goua

M. Marc Goua. Le but du fonds est d’aider les collectivités à sortir de ces emprunts dangereux. Or, cela entraîne des frais : les pénalités sont relativement importantes et, malgré l’intervention du fonds, certaines communes pourraient être amenées à réemprunter des sommes relativement importantes – ce qui pourrait entraîner de nouvelles difficultés.
Le taux usuraire est aujourd’hui de 3,4 %, ce qui est sans commune mesure avec le taux en vigueur lorsque les prêts ont été contractés : avec cet amendement, on pourrait refinancer en considérant le taux d’usure en vigueur lorsque le contrat d’origine a été signé
– en général, aux alentours de 5 %. Cela permettrait d’étaler la charge, et de ne pas réemprunter, ou presque pas. Les collectivités seraient ainsi soulagées.
Je peux apporter une information, qui m’a été transmise par le secrétaire général du fonds. Celui-ci travaille actuellement à une modification réglementaire qui permettrait de ne pas prendre en compte dans l’endettement les sommes qui seront réempruntées. En effet, certaines collectivités risquent de connaître des grandes difficultés pendant encore de longues années.
Cet amendement, je le précise, a reçu l’aval du fonds lui-même.

Mme la rapporteure générale. Je ne suis plus très sûre d’avoir compris…
Les prêts structurés posent différents problèmes. Ainsi, pour déboucler un prêt structuré, il faut payer un prix qui varie en fonction des paramètres utilisés pour le construire – taux de change entre le franc suisse et l’euro, par exemple. Or, j’aimerais disposer d’une simulation de la valeur de ces prêts en fonction des différents paramètres de marché. Céder un prêt quand il vaut 100 ou le céder quand il vaut 300, ce n’est pas tout à fait la même chose, notamment pour le fonds. Je regrette que cette évaluation ne soit pas clairement faite, et je suis en train de préparer un amendement pour demander qu’elle le soit. La dynamique d’un produit structuré n’est pas du tout, à ma connaissance, intégrée à la logique du fonds.
Le problème que pose cet amendement est différent ; mais je ne comprends pas le rôle que joue le taux usuraire.

M. Marc Goua. Pour répondre à votre première remarque, je note que le fonds peut intervenir de deux façons différentes : il peut financer la soulte demandée pour se dégager, ou bien il peut permettre d’écrêter le taux pendant trois ans, cette période étant renouvelable une fois. Je me félicite de vos propos, madame la rapporteure générale, parce que je crois que choisir l’écrêtement coûterait deux fois moins cher à l’État ! Or, le secrétaire d’État au budget m’a dit hier qu’il préférait la première solution, parce que le Gouvernement voulait se débarrasser du problème au plus vite.

Mme la rapporteure générale. Évidemment, il vaut mieux attendre un peu, si l’on pense raisonnablement y gagner, plutôt que de brader tout de suite. C’est pourquoi je vais demander cette évaluation. D’autres États, qui ont rencontré les mêmes problèmes, agissent de cette façon, pourquoi pas la France ?

M. Marc Goua. C’est d’autant plus vrai que le taux de change de l’euro contre le franc suisse est passé en peu de temps de 1 à 1,09 – ce qui change très sensiblement le calcul de la soulte. Je suis entièrement d’accord avec vous, et j’ai essayé de convaincre Bercy – si vous essayez à votre tour, peut-être réussirons-nous. Ainsi, beaucoup de prêts étaient fondés sur la parité entre dollar et franc suisse : aujourd’hui, ils se traitent, à l’échéance, à 4,20 % ou 4,30 % – ce ne sont pas les taux d’aujourd’hui, mais ce sont les taux que les emprunteurs auraient obtenu lorsqu’ils ont souscrit le prêt. L’écrêtement serait un filet de sécurité ! Mais on m’a dit hier que cette modalité, prévue par la loi, serait en pratique inaccessible. J’ai écrit sur ce sujet au secrétaire d’État au budget, aujourd’hui même.
L’Allemagne a agi de façon complètement différente : d’abord, le gouvernement est allé voir les banques, qui sont les grandes banques américaines, pour leur dire qu’il n’était pas question de payer les sommes astronomiques réclamées ; ensuite, il a trouvé un fonds de défaisance américain qui a racheté une partie de la créance, et il en a apporté une autre. Au total, cela lui a coûté deux fois moins cher.

Mme la rapporteure générale. C’est bien à l’exemple allemand que je faisais référence.

M. Marc Goua. Aujourd’hui, des négociations sont en cours. Certaines collectivités pourraient, au lieu de verser une soulte de 1 million d’euros, la payer sur la durée en l’intégrant dans le taux. La faiblesse des taux en ce moment est une chance à saisir : elle permet pratiquement d’éliminer la soulte.
J’avais présenté cet amendement l’an dernier, et il avait été rejeté ; le secrétaire général du fonds m’a confirmé cette année qu’il apporterait pourtant des solutions à des problèmes aujourd’hui insolubles.

Mme la rapporteure générale. Avis favorable à l’amendement. Cela permettra au moins d’en débattre en séance publique avec le Gouvernement.

La commission adopte l’amendement I-CF1.

Le gouvernement a soutenu un amendement du député Marc Goua (SRC, Maine-et-Loire) facilitant la renégociation des emprunts toxiques des collectivités locales. Le texte devrait toutefois faire l’objet de modifications durant la navette.

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire