samedi 17 janvier 2015

Emprunts toxiques : l’envolée du franc suisse sème la panique

Emprunts toxiques : l’envolée du franc suisse sème la panique

La situation devenant intenable, a Banque nationale suisse (BNS) a décidé le 15 janvier de lâcher prise sur sa monnaie dont la parité par rapport à l’euro était maintenue artificiellement à un taux plancher de 1,20 franc suisse pour un euro depuis septembre 2011. Il cote désormais à parité avec l’euro, soit une réévaluation du franc suisse d’environ 15 %.

« Le fait déclencheur résulte de la baisse de l’euro par rapport au dollar, mais aussi des autres monnaies, donc mécaniquement le taux du franc-suisse a baissé », explique le consultant Emmanuel Fruchard. La BNS a donc décidé de ne plus soutenir l’euro en l’achetant à 1,20 franc suisse, « car cela demandait une prise de risque trop importante ». La surprise vient davantage du moment de l’exécution de cette décision que de la décision elle-même qui était prévisible.
Conséquences colossales - « Le franc suisse est sous côté d’au moins 7 % », expliquait au Club finances, fin novembre 2014, l’avocat Marc Le Son. « Quand la BNS ne pourra plus contenir sa parité monétaire ou lorsque le coût consacré par la Suisse à la tenue de cette parité deviendra trop lourd, la monnaie suisse sera valorisée de manière importante, de l’ordre de 25 %, ce qui entrainera une forte progression des taux des contrats toxiques indexés sur le cours euro/franc suisse », ajoutait-il.
Ce scénario vient donc de se réaliser avec des conséquences colossales pour les collectivités locales détentrices d’emprunts toxiques indexés sur les parités entre ces monnaies. « Non seulement les taux de tous les emprunts indexés sur les cours de change euro/franc suisse et US dollar/franc suisse vont fortement augmenter, mais également ceux indexés sur la différence entre la parité euro/US dollar et US dollar/franc suisse », prévient Emmanuel Fruchard qui a déjà procédé à des estimations.
Les taux d’intérêts explosent - Par exemple, au moment où nous écrivons ces lignes, le taux d’intérêt d’un contrat de la communauté d’agglomération de Chartres métropole passe de 21,9 % avec un euro à 1,2 franc suisse à 44,20 % avec à 1 euro à 1 franc suisse, quand celui de la ville de Montoir-de-Bretagne (Loire-Atlantique) bondit de 16,50 % à 28,79 % et celui du Syndicat intercommunal pour la destruction des résidus urbains (SIDRU), basé à Saint-Germain-en-Laye (Yvelines) explose littéralement de 38,31 % à 65,61 %.
Christophe Greffet, président de l’association Acteurs publics contre les emprunts toxiques (APCET) et vice-président (PS) du département de l’Ain, a déjà fait ses calculs. Avec une dette toxique de 42 millions d’euros indexée sur la parité euro/franc suisse et la différence entre la parité euro/US dollar et US dollar/franc suisse, le surcoût s’élève à 3,8 millions d’euros. Pour un seul prêt d’un montant de 9,8 millions, le taux évolue de 8 % à 30 %, soit 2 millions d’euros d’intérêts par an.
Méfiance sur les coûts d’annulation - « L’APCET a toujours évoqué ce risque potentiel », souligne Christophe Greffet pour lequel cet événement « gravissime » pose la question de « l’architecture » du fonds de soutien aux emprunts toxiques mis en place par l’Etat pour financer une partie des indemnités de remboursement anticipé (IRA) à payer par les collectivités pour renégocier leur contrat.
« L’envolée du franc suisse va faire exploser les IRA », prévient-il, « dès lors la mécanique du fonds ne tient plus et son modèle économique doit être révisé ». Le président de l’APCET considère même que cet événement va redonner de « l’actualité aux contentieux en cours » dont certains devraient donner lieu à des décisions de justice au mois de février.
« Par ailleurs, alerte Emmanuel Fruchard, si une collectivité négocie une sécurisation, elle doit considérer avec prudence les coûts d’annulation communiqués par les banques ». En effet, « le fait que l’État aide les collectivités au taux maximum de 45 % des coûts d’annulation pourrait inciter les deux autres acteurs, à savoir les banques et les collectivités, à afficher des coûts artificiellement élevés ». Comme nous avons souvent l’occasion de l’écrire, le feuilleton des emprunts toxiques n’en fini pas de rebondir.

http://www.lagazettedescommunes.com/315160/emprunts-toxiques-lenvolee-du-franc-suisse-seme-la-panique/

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