En juillet dernier, elle passait haut la main les stress tests européens. Aujourd'hui trois ans après son sauvetage in extremis de la faillite, Dexia vit peut-être ses dernières heures. A l'issue d'un conseil d'administration marathon lundi soir à Bruxelles, la banque a laissé présager un nouveau virage stratégique en ouvrant la voie, dans un communiqué sybillin, à de nouvelles cessions et alliances pour résoudre ses "problèmes structurels". Certains y voient déjà les premiers signes d'un démantèlement imminent. Ce mardi matin, la banque a encore perdu un tiers de sa valeur en Bourse, son titre est passé sous la barre des 1 euro. Retour sur les nombreux faux-pas de la banque franco-belge.
Les difficultés commencent en 2007 avec la crise des subprime. FSA sa filiale américaine spécialisée dans le rehaussement de crédit, est à l'origine de la tourmente : l'assureur américain s'est en effet aventuré dans la grande bulle spéculative du subprime, causant des milliards de pertes à sa maison-mère. Après la faillite de Lehman, Dexia, qui se trouve dans l'impossibilité de se refinancer sur les marchés, va être sauvée par les gouvernements français et belge, qui mettront 6,4 milliards d'euros au pot, et prendront le contrôle de la banque. Aujourd'hui, Dexia s'est délestée de la plupart de ses actifs toxiques liés aux subprimes en revendant en juillet 2009 sa filiale américaine. Mais cela n'a pas mis un terme à la tourmente...
La seule banque qui a raté son plan de sauvetage
La seule banque qui a raté son plan de sauvetage
La cure d'austérité imposée par la Commission européenne après son sauvetage public n'a pas effacé toutes les traces du passé. Le groupe a fait des efforts certes, il a réduit son bilan de 651 milliards d'euros fin 2008 à 527 milliards fin mars, mais le leader déchu du financement des collectivités locales paie encore les conséquences d'une expansion tous azimuts. C'est pourquoi Dexia a annoncé fin mai vouloir accélérer les cessions d'actifs à risque ou illiquides. Au deuxième trimestre elle a passé une charge exceptionnelle de 3,6 milliards d'euros dans ses comptes, qui lui coûteront ses bénéfices annuels. Depuis la crise financière de 2008, Dexia a cédé 73 milliards d'euros d'actifs. Là encore, ce sera insuffisant.
La deuxième banque européenne la plus exposée aux obligations grecques Car aujourd'hui la banque se trouve directement confrontée au problème de la dette souveraine. Avant la crise de 2008 Dexia s'était fait une spécialité dans le rachat d'obligations souvent très longues, financées à court terme. Un comportement très risqué, qui rendait la banque extrêmement dépendante des marchés. Entre 2008 et 2011, ses besoins en financement à court terme sont passés 265 milliards d'euros à 96 milliards d'euros. Un effort considérable mais insuffisant pour résoudre les problèmes actuels. La banque franco-belge détient en effet un portefeuille obligataire d'environ 100 milliards d'euros dans lequel figurent des filiales de financement des collectivités publiques européennes (Crediop et Dexia Sabadell en Italie et en Espagne) et des dettes souveraines de pays en difficulté (3,7 milliards d'euros d'obligations grecques, juste derrière les 5 milliards de BNP). Un portefeuille à risque qui nécessite des montants d'actifs en collatéral très lourds, ce qui plombe les autres activités de la banque.
Une banque en panne de liquidités Or la grande faiblesse de Dexia a été d'oublier pendant trop longtemps qu'elle ne pouvait compter en France sur un réseau de banque de détail, pour se refinancer à court terme sur les marchés. C'est d'ailleurs cette crise de liquidité qui avait rendu nécessaire son sauvetage en 2008. Aujourd'hui, Dexia a beau avoir réduit son besoin d'argent frais, elle détient toujours trop d'actifs et trop de prêts à long terme pour trop peu de dépôts. C'est d'ailleurs pour cette raison que les actionnaires publics de la banque, qui possèdent un peu plus de 50 % du capital, ont décidé lundi soir une opération chirurgicale de grande ampleur (voir encadré).
La banque qui s'est mise à dos les collectivités Même sur son coeur de métier, a priori non spéculatif, la banque a réussi à multiplier les erreurs... Cela fait des années maintenant que la banque est touchée par le scandale des prêts toxiques aux collectivités, ces produits structurés reposant sur des montages financiers sophistiqués, et qui ont plombé des milliers de communes. Depuis la fin 2009, Dexia est régulièrement attaquée en justice et son fonds de commerce a largement pâti du scandale : si Dexia détient toujours 40% des encours des crédits aux collectivités (environ 70 milliards d'euros), elle ne réalise que 15% des nouvelles affaires. De quoi déséquilibrer un peu plus son bilan.
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